Robert Capa, Israël, 1948
Robert Capa : Israël, 1948-1950
Les images que Robert Capa nous a léguées incarnent aujourd’hui la mémoire des conflits majeurs du siècle passé ; livrant les événements dans leur immédiateté et leur cruauté (« Si vos photos ne sont pas assez bonnes, c’est que vous n’êtes pas assez près » disait-il), ses clichés sont devenus des emblèmes des tragédies de l’histoire.
« Capa pouvait montrer la crainte de tout un peuple sur le visage d’une enfant. Son appareil attrapait et retenait l’émotion. »
John Steinbeck.
Lorsqu’en novembre 1947, l’Assemblée générale de l’Onu adopte le plan de partage de la Palestine en deux États indépendants, mettant ainsi fin au mandat britannique, Robert Capa décide immédiatement de se rendre sur place ; le magazine Life, qui était son commanditaire habituel, ayant déjà désigné trois photographes, il obtient une mission du magazine Illustrated. Arrivé à Tel-Aviv le 8 mai 1948, il assiste le 14 à la proclamation officielle de l’État d’Israël et couvre l’invasion des armées arabes qui débute dès le lendemain. Il séjourne à nouveau plusieurs mois en Israël, après la signature de l’armistice en janvier 1949, accompagné du journaliste Irwin Shaw du New Yorker ; leur collaboration aboutit à la publication de Report on Israel (Simon and Schuster, 1950). L’année suivante, il y revient pour réaliser un film à la demande de l’Appel Juif Unifié. C’est alors qu’il photographie l’afflux des immigrants dans le pays, les camps d’hébergement et les grands travaux que le jeune État met en place. Eternel apatride, Robert Capa est ému par le sort de ces réfugiés, et fasciné par leur volonté d’intégration. Lui-même caressa un temps l’idée de s’installer à Tel-Aviv, avant d’être absorbé par de nouveaux projets.
Né à Budapest en Hongrie en 1913 sous le nom de Endre Ernö Friedmann, Robert Capa fait, entre 1931 et 1933, des études de sciences politiques à Berlin, où il travaille comme photographe pour l’agence Delphot. L’avènement du nazisme le contraint à émigrer en 1934 à Paris, où il participe à la création de l’agence Alliance Photo. Ses images sur la guerre civile espagnole, largement diffusées dans la presse (Vu, Regards, Weekly Illustrated, Life…), lui valent une reconnaissance internationale. Après un voyage en Chine en 1938, il s’installe à New York en 1939 où sa mère réside déjà. Il photographie la Seconde Guerre mondiale en Europe à partir de 1942, en suivant la progression des armées américaines, comme représentant de Life Magazine. Il est alors décoré de la médaille de la Liberté par l’armée américaine. Il publie ses mémoires de guerre dans l’ouvrage Slightly Out of Focus (Henry Holt & co, 1947), en référence à ses images du débarquement, « légèrement floues ». Membre fondateur, avec David Seymour « Chim », Henri Cartier-Bresson, George Rodger et William Vandivert de l’agence Magnum en 1947, il en est nommé président en 1951. Toujours en 1947, il se rend en URSS avec John Steinbeck, et en rapporte A Russian Journal (Viking Press, 1948). Malgré le ton critique du livre, le FBI le soupçonne d’affinités communistes alors que débute la guerre froide. Si dans l’après-guerre, il réalise des reportages sur les personnalités du cinéma et de la mode, il repart dès 1954 en Indochine, où il est tué par une mine près de Thai-Binh (Viêt-nam).
Commissariat
Conception : Georges Bensoussan, historien, auteur de Une Histoire intellectuelle et politique du sionisme, 1860-1940 (Fayard, 2002)
Coordination : Nicolas Feuillie, historien de l'art, responsable de la collection photos et Denis Jacquemin, mahJ
Une exposition produite par le musée d’art et d’histoire du Judaïsme en association avec Magnum Photos