Marceline Loridan-Ivens
Rencontre enregistrée à l’occasion de la parution de son livre événement Et tu n’es pas revenu (Grasset, 2015)
En conversation avec ses deux jeunes amis, Audrey Gordon, journaliste et réalisatrice et Tom Boeken, polytechnicien, ingénieur des Mines « J’ai été quelqu’un de gai, tu sais, malgré tout ce qui nous est arrivé. Je pouvais raconter le pire en riant, ou ne plus y penser. » Ainsi commence cette lettre de Marceline Loridan-Ivens à son père dans son dernier ouvrage Et tu n’es pas revenu. Ils ont été déportés ensemble au printemps 1944, elle à Birkenau, lui à Auschwitz. Dès Drancy, il avait prédit l’avenir : Toi tu reviendras parce que tu es jeune, moi je ne reviendrai pas. De la rue des Saints-Pères, où elle vit depuis quarante ans, elle lui parle. Elle lui raconte ce qu’elle aurait voulu partager avec lui au retour, car lui seul aurait pu comprendre, la baguette du démon Mengele sur son corps de jeune fille de 15 ans les jours de sélection, l’odeur, la faim, son travail au service de la mort, les enfants sur la rampe qu’elle a construite, marchant vers la chambre à gaz. Elle lui dit le retour, la famille démembrée sans lui, les camps qui tuent même ceux qui n’y sont pas allés, le frère, la sœur qui mettent fin à leurs jours. Elle lui dit le monde d’après, elle tend la main : la haine est encore là, à portée... La vie a passé, Marceline Loridan-Ivens a aimé, vécu, voyagé, cru à la révolution, réalisé des films.
Aujourd'hui, l'une des dernières survivantes des camps, Marceline, aussi jeune qu'il y a 70 ans, reste une voix forte qui n'a peur ni des mots, ni de la réalité. C'est une chance de pouvoir l'écouter, dialoguer avec elle. Comme le font ses jeunes amis, Audrey et Tom, qui puisent, eux-aussi, leur énergie dans son histoire.