Lettre à sa femme Marie Eskénazi
ESKENAZI, Raphaël
Drancy, Seine-Saint-Denis, France,
1942.06.30
Inv.
2008.14.022Document d'archives
Lettre
photo © mahJ
Dimensions :
H. 13,9 - L. 9 cmEcriture manuscrite à l'encre sur papier ligné
mahJ,
don de Kaurine Lakajzen née Eskénazi
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Appartenance à un ensemble
Ensemble de 26 lettres et 3 contratsDestinataire
ESKENAZI, Madame MarieJustification de la date
Date inscrite sur la feuilleHistorique
Voir aussi l'ensemble des lettres en judéo-espagnol MAHJ 2003.27.Pris dans une rafle le 20 août 1941 à Paris, Raphaël Eskénazi est interné à Drancy. Tombé malade, il est transféré et soigné à l'hôpital Tenon puis à l'hôpital Rothschild. Il sera déporté vers Auschwitz en septembre 1942.
Raphaël et Marie Eskénazi (née Senie) se marièrent à Paris en 1920 et eurent trois enfants: Esther, Kaurine et Victor (dit aussi Victor-Menaché). Marie était réparatrice de tapis et venait d'une famille d'Istanbul. Raphaël venait d'Ankara et était tailleur. Le frère de Raphaël, Joseph était professeur de français en Turquie. Sa femme se nommait Esther. Une fois immigré en France, Joseph est cordonnier.
Description
Une carte portant recto-verso un texte manuscrit.Langue
FrançaisInscriptions
Recto: "Drancy le 30/6/1942. Ma chère Marie et mes chers enfants. En réponse à ta charmante carte du 23 courant je suis très satisfait d'apprendre que vous êtes en bonne santé et moi de ma part je me porte assez bien. Je reçois régulièrement tous les colis alimentaires et linge, dans le colis à linge j'ai reçu le taled et le petit livre de Tehelim, mais tu as oublié de mettre le livre et le tout petit de Tefila de tous les jours. N'oublies pas de me l'envoyer à la première occasion. Maintenant écoute moi bien chère Marie. Je veux que tu ailles aux hôpitaux Rotschild et Ténon et leur demander des certificats de ma maladie cardiaque à l'hôpital Tenon j'ai été salle Parrot et salle Seymour dans cet hôpital j'ai des plaques de radio tu prendras des certificats très détaillés tu feras de même à l'hopital Rotschild et ces certificats tu les feras légalisés par le commissariat de leur quartier et tu me les envoi sous pli recommandé le plus tôt possible. Dans le prochain colis à linge tu m'enverras papier hygienique une petite veste si tu peux m'en procurer car celle que j'ai est presque inutilisable quelques gros clous pour les talons car je n'ai pas eu assez, un morceau de tissu en rayures pour racommoder le pantalon et avec le prochain colis alimentaire envoi moi quelques comprimés d'aspirine. Et voici la note de colis de longe sale que je t'envoie 1 serviette un taie d'oreiller 3 sacs 1 caleçon 1 tricot 1 chemise papiers ficelle. L'argent que tu as reçu de Mme Behar c'est bien 1000 frs"
Verso:
"[2 à 3 mots raturés] Mr. Rubin est parti cette semaine avec le convoi des travailleurs averti la chère cousine Anoun pour qu’elle soit au courant. Je voudrais que tu ailles au Consulat avec d’autres femmes pour te renseigner pourquoi des Turcs sont partis dans ce convoi est-ce que nous ne risquons rien ? j’ai reçu l’attestation de la Beyanamé aujourd’hui lundi. Chère Marie la paire de semelles en caoutchouc que tu m’avais envoyé elles n’ont pas été fameuses en moins d’une semaine que je les ai portés elles commencent à se déchirer parce que j’ai vu avant de les clouer elles avaient des couches séparées enfin que veux tu cela n’est pas de ta faute on a du mal à trouver les choses et par le temps si tu trouves une paire de meilleur qualité tu m’en acheteras car celles-ci je n’aurai pas pour longtemps. N’oublie pas de me mettre un peu de sel et dans le colis à linge tu me mettras un peu de fil blanc pour la couture à la main. J’ai été bien content que maman est allé voir Pepo à la campagne mais pourquoi les enfants n’ont pas été le voir ? Je te recommande de faire rentrer les enfants à la maison le plus tôt possible dans la soirée pour éviter les ennuis. Je termine ma carte en t’embrassant bien fort à toi chère Marie chères Esther Corine Victor, et chères maman belle-mère ma belle sœur Esther et beaux frères et belles sœurs. Cousins cousines et tous mes amis de ton cher mari R. ESKENAZI"
Bibliographie
Kaurine Lakajzen, "Avoir 13 ans sous l'occupation allemande (1941-1945). Lettres de mon père". Traduction du judéo-espagnol par Haïm Vidal Sephiha.