Lettre à sa femme Marie Eskénazi
ESKENAZI, Raphaël
Drancy, Seine-Saint-Denis, France,
1942.06.14
Inv.
2008.14.017Document d'archives
Lettre
photo © mahJ
Dimensions :
H. 14 - L. 9 cmÉcriture manuscrite à l'encre noire sur papier ligné, crayon de couleur rouge.
mahJ,
don de Kaurine Lakajzen née Eskénazi
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Appartenance à un ensemble
Ensemble de 26 lettres et 3 contratsDestinataire
ESKENAZI, Madame RaphaëlHistorique
Voir aussi l'ensemble des lettres en judéo-espagnol MAHJ 2003.27.Pris dans une rafle le 20 août 1941 à Paris, Raphaël Eskénazi est interné à Drancy. Tombé malade, il est transféré et soigné à l'hôpital Tenon puis à l'hôpital Rothschild. Il sera déporté vers Auschwitz en septembre 1942.
Raphaël et Marie Eskénazi (née Senie) se marièrent à Paris en 1920 et eurent trois enfants: Esther, Kaurine et Victor (dit aussi Victor-Menaché). Marie était réparatrice de tapis et venait d'une famille d'Istanbul. Raphaël venait d'Ankara et était tailleur. Le frère de Raphaël, Joseph était professeur de français en Turquie. Sa femme se nommait Esther. Une fois immigré en France, Joseph est cordonnier.
Description
Une carte portant d'un texte dense manuscrit recto-verso.Langue
FrançaisInscriptions
Recto:"Ma très chère Marie et chers enfants. Je suis en possession de votre charmante carte du 7 courant dans laquelle je fus très heureux d'apprendre de vos bonnes nouvelles. Quant à moi je me trouve en parfaite santé. Je suis très content de lire les bonnes nouvelles de Mme Canessa, et très satisfait d'apprendre que Corine et Victor fréquentent le Talmud Tora. C'est très bien mes chers petits continuez et faites attention à ces études et progressez bien. Reçu colis de linge et alimentaire. Dans le colis de linge j'ai reçu semelles et clous et talons et une boîte de cirage merci beaucoup. Envoie moi quelques gros clous longs avec des têtes pour fixer les talons. je t'ai expédié jeudi 11 courant le colis de linge sale contenu: 3 sacs, 1 paire gants, 1 paire chaussettes 1 cache-col 1 chemise, 1 tricot, 2 caleçons, 1 bocal, ficelle, papiers. Au sujet des colis alimentaires je te dis la même chose que Joseph a déjà écrit à Esther tout se tourne impossible d'en profiter à cause des grandes chaleurs je te conseillerai de m'envoyer un morceau de saucisson sec à la place de viande et ainsi je n'aurai pas à regretter de ce que vous depensez et que vous vous en privez pour me l'envoyer. Ne m'envoies pas du sucre pour un colis car j'en ai pour m'en passer. J'ai reçu les photos de Victor et nous sommes très contents. je vois qu'il devient un beau garçon. J'espère qu'il est gentil et sage comme il est dans la photo et que vous tous mes enfants j'espère que vous obéissez maman et que vous lui donnez un beau coup de main car elle doit avoir beaucoup affaire et trop de fatigue pour nous tous./"
suite au verso:
"Dans le prochain colis de linge tu me mettras : le petit livre de prières que j'ai parmi les livres, le livre de Tehélimes qui est le tout petit et le Taled. Aussitôt que tu prends la présente carte vas trouver Madame Victoria Béhar 10 avenue Parmentier elle te remettra mille francs au compte d'un travail que j'avais fais à Paris et que nous sommes d'accord avec son mari ici que nous sommes tous les deux rentrés de l'hôpital, et dès que tu le reçois tu m'aviseras car Mr Béhar a déjà averti sa femme. J'ai appris avec satisfaction les nouvelles demarches entreprises par un avocat turc auprès d'Ankara. Dieu qui fasse qui ait un heureux dénouement de l'affaire et qu'Il nous délivre de la situation dont nous nous trouvons. Amènes les petits à la campagne chez ton cousin si c'est possible un dimanche qui sont déjà à la maison. Envoie moi le numero de la Beyauamé cela peut m'être utile. Dans le prochain colis à linge tu m'enverras une serviette de table. Je suis très content que tu as amené maman et ta maman chez Pepo à la campagne. il a dû être content de les voir. Plus rien à t'écrire, je termine ma carte en t'embrassant de deux baisers sur tes joues ma chère Marie. J'embrasse bien fort Esther, Corine, Victor, maman et belle soeur, belle-mère, cousin cousines beaux-frères belle-soeurs et tous les amis. A bientôt de ton cher mari R. ESKENAZI
Bibliographie
Kaurine Lakajzen, "Avoir 13 ans sous l'occupation allemande (1941-1945). Lettres de mon père". Traduction du judéo-espagnol par Haïm Vidal Sephiha.